Jean Ray parle
par Jacques VAN HERP
A côté du Jean Ray publié, il existe un Jean Ray épistolaire et oral, digne d'intérêt, qu'il faut capter au vol, enregistrer sur le moment, car, de plus en plus, il renâcle à se pencher sur le papier.
Ma paresse m'est précieuse.
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J'ai connu les anciens des UB allemands, et j'en ai connu des sous-marins anglais. Les derniers étaient des crâneurs à froid. Seuls les Allemands osaient avouer leur peur, et une peur qui n'était pas celle des autres.
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Le tout premier conte, je l'ai écrit vers la vingtième année. C'est d'ailleurs celui que j'ai envoyé à André Theuriet - Le diable est venu me chercher à bord. Theuriet m'a presque répondu sur-le-champ : "Si vous venez à Paris, passez me voir... il faut continuer..." Mais je devais partir pour Hambourg. Quand je suis revenu, un an après, Theuriet venait de mourir... J'ai peut-être repris le sujet dans un John Flanders flamand. Mais le ne m'en souviens pas. J'en ai tant écrit...
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J'ai commencé à écrire des Harry Dickson vers 1930 environ. le faisais un Harry Dickson en une nuit. Soixante pages de dactylographie. J'étais plus fort que Simenon.
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Je me fais ruminant et néflier... digérer et mûrir...
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J'ai très bien connu Maurice Renard. Chaque fois que le venais à Paris, j'allais chez lui, rue de Tournon. Et j'y rencontrais la grande Colette. Elle était charmante et moi j'étais beau gosse, ça te suffit ?
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Ghelderode m'écrivait depuis fort longtemps, mais je n'allais jamais le voir. Je ne vais jamais voir les gens. Il y a quelques années, je savais qu'il se trouvait à Ostende, et j'y suis allé. Quand il est tombé malade, je suis allé le voir régulièrement, avec le doc, tous les huit jours. Il est devenu celui qu'on rencontre presque quotidiennement. Quand il ne m'écrivait pas, je venais.
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Les thèmes de son oeuvre
Ah ! oui... celui-là... C'est possible... Ce n'est pas impossible. Je ne dis rien... |
Tu dis que les dieux existent, existent en fonction des hommes et dépendent d'eux.
C'est absolument exact, et absolument logique. Les dieux naissent, les dieux existent ou ont existé. Ils naissent des hommes, ils ont par conséquent la vie des hommes, ils meurent comme les hommes. Comme ils vivent de croyance en eux; aussi longtemps qu'on croira en eux, ils vivront.
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Pourquoi pas ?
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Le démon est un esprit fraternel. Dans la Bible il apparaît. Pourquoi sous la forme du serpent ? Enfin… Il veut donner la science aux hommes. Ensuite, dans la mythologie, il apparaît sous la forme de Prométhée qui leur apporte le feu. Il a tellement pitié des hommes qui ont froid que pour eux il vole le feu...
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Il dit que je suis un musée vivant d'hérésiologie.
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Instinctivement je ne l'ai pas fait. Je travaille toujours par instinct, il y a une grande partie animale chez moi. Et ça m'embêtait déjà assez de devoir écrire. Alors des romans réalistes ! |